samedi 8 octobre 2011

Quand les médecins doutent des médicaments qu'ils prescrivent

Les résultats du sondage exclusif L'Express/CompuGroup Medical révèlent que les patients ne sont pas les seuls à perdre confiance dans les traitements prescrits. Les praticiens aussi.

On les imagine sans peine au volant de leur voiture, comme tous les matins, écoutant les nouvelles à la radio en rejoignant leur cabinet pour une grosse journée de consultations. Ils sont médecins de famille, dermatologues ou bien ophtalmos. Et ils pestent en silence: encore un rebondissement dans l'affaire du Mediator! Les voilà qui soupirent: "Ça ne va donc jamais s'arrêter?" Accablés, ils tendent le bras pour éteindre le poste, mais déjà le présentateur annonce qu'un nouveau médicament se retrouve sur la sellette: le Protelos, un traitement courant contre l'ostéoporose. Un de plus! "Et demain, à qui le tour?"
marmonnent-ils, le moral en berne.

>> Consulter le sondage en détail

Arrivés à destination, ces médecins traversent la salle d'attente, encore déserte, s'assoient derrière leur bureau et allument leur ordinateur. La routine leur dicte les tâches, dans l'ordre: ouvrir la messagerie, cliquer sur l'icône permettant d'accéder au dossier du premier patient inscrit dans l'agenda. Quand une fenêtre s'ouvre à l'écran, leur proposant de participer au sondage de L'Express sur la confiance qu'ils accordent aux médicaments, certains zappent. Mais ils sont 330 praticiens, sur les 10 000 équipés du logiciel CompuGroup Medical, à trouver le temps d'y répondre, en cette fin de septembre réputée chargée. Un nombre significatif de praticiens qui n'ont pas hésité à livrer leur sentiment en dépit du sujet, brûlant. L'occasion, trop rare, de s'épancher? Notre journal, en tout cas, a souhaité que le questionnaire soit anonyme, pour que les intéressés puissent le remplir avec un maximum de sincérité. La méthode employée pour sonder les médecins libéraux est inédite. Les résultats le sont tout autant.

La main qui tremble au moment de faire une ordonnance


L'Express-CompuGroup Medical

On savait déjà que le scandale du Mediator avait ébranlé les certitudes des patients vis-à-vis de leurs traitements. On découvre, cette fois, que les médecins eux-mêmes doutent. Plus d'un sur quatre admet avoir la main qui tremble, désormais, au moment de rédiger son ordonnance! Ainsi, ils sont 28% à déclarer que "leur état d'esprit n'est pas très serein" ou "pas du tout serein lorsqu'ils prescrivent des médicaments". Et, à y regarder de plus près, ceux qui se disent "assez sereins" (54%) pourraient bien, dans leur for intérieur, ne pas l'être autant qu'ils le prétendent. Comment expliquer, sinon, cette écrasante majorité (72%) qui "pense que d'autres laboratoires que Servier ont pu cacher des informations essentielles liées aux risques de leurs médicaments"? Une chose est sûre: le soupçon s'est installé, et pour longtemps.

Dans son cabinet de généraliste, à Vanves (Hauts-de-Seine), le Dr Patrick Jouaneau n'a pas eu l'occasion de répondre au sondage. Mais il l'avoue, du bout des lèvres: depuis le Mediator, il est "plus circonspect qu'avant" vis-à-vis des médicaments. Le Protelos? Il ne le prescrit plus. "J'attends d'y voir clair", dit-il. Les nouveaux traitements lancés par les laboratoires pharmaceutiques? "J'y regarde à deux fois", prévient-il. Le médecin, fort de ses vingt-six ans d'exercice, se rabat sur les bonnes vieilles molécules dont il a l'expérience. Pas vraiment d'autre choix, comme il le souligne: "Au bout du compte, il faut quand même continuer à soigner les patients, non?"

L'express.fr

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